A l’occasion d’une chouette escapade à Niigata, j’ai eu le plaisir de visiter une brasserie traditionnelle de saké. « Imayo Tsukasa » produit du saké depuis plus de 250 ans et propose de super visites guidées en anglais… avec dégustation ! Une visite passionnante, car il s’agit d’une des dernières brasseries japonaises à utiliser des techniques traditionnelles comme la fermentation en fûts de cèdre. C’est parti pour un tour dans ce lieu chargé d’histoire et des arômes fleuris du saké 🙂

Niigata, capitale du riz et du saké

La qualité du riz, principal ingrédient du saké, est primordiale dans la qualité du produit fini.
La qualité du riz, principal ingrédient du saké, est primordiale dans la qualité du produit fini.

Niigata est une ville portuaire située sur la côte nord du Japon, et le chef-lieu d’une préfecture qui porte son nom. C’est d’ailleurs dans celle-ci que j’habite en ce moment, à l’occasion de ma saison en station de ski japonaise ! Il y a quelques jours, je suis allée visiter cette ville connue au Japon pour son riz et son saké. En effet, le riz est le principal ingrédient du saké, vin japonais affichant généralement de 14° à 17° d’alcool. Un produit donc bien moins fort que ce qu’on croit souvent… En effet, il y a en France une confusion entre ce vin de riz et la gnôle qu’on sert en digestif dans les restos chinois ! xD

Le riz de la préfecture de Niigata est réputé pour sa qualité en cuisine. En outre, de nombreux agriculteurs produisent un riz prévu tout spécialement pour la production de saké. Si l’on ajoute à cette production la position stratégique de Niigata face à la mer, on comprend que la ville ait développé le commerce du saké depuis plusieurs siècles.

Visite de la brasserie de saké « Imayo Tsukasa »

Lorsque de mon escapade à Niigata, je suis donc allée visiter la brasserie traditionnelle « Imayo Tsukasa« . Cela signifie « maître du temps » – un nom bien choisi car il rappelle que la fabrication du saké, reposant sur une fermentation naturelle, est affaire de patience… et aussi un peu de chance ! Surtout quand on produit un saké de type « junmai », sans ajout d’alcool distillé pour contrôler la fermentation.

La brasserie Imayo Tsukasa a plus de 250 ans, mais elle est aujourd'hui installée dans des bâtiments datant de 1900 environ. La grande cheminée témoigne de la nécessité d'utiliser la vapeur dans le processus de fabrication du saké. En effet, c'est elle qui permet de transformer les grains de riz pour transformer l'amidon en sucre et enclencher la fermentation.
La brasserie Imayo Tsukasa a plus de 250 ans, mais elle est aujourd’hui installée dans des bâtiments datant de 1900 environ. La grande cheminée témoigne de la nécessité d’utiliser la vapeur dans le processus de fabrication du saké. En effet, c’est elle qui permet de cuire les grains de riz pour transformer l’amidon en sucre et enclencher la fermentation.

Le terme de « brasserie de saké » vous a surpris ? Moi aussi, car j’ai toujours considéré le saké comme un vin de riz ! Mais en réalité, comme il est produit par la fermentation d’un mélange d’eau et de riz, son processus de fabrication se rapproche plutôt de celui de la bière… D’où sa durée de conservation assez courte (environ un an), contrairement au vin que l’on peut bien sûr faire vieillir.

Cette enseigne de la brasserie de saké Imayo Tsukasa se trouvait sur le toit de l'ancienne fabrique. Les kanji (caractères sino-japonais) sont taillés dans du bois de cèdre, le même qu'on utilisait pour la fabrication des fûts de fermentation.
Cette enseigne de la brasserie de saké Imayo Tsukasa se trouvait sur le toit de l’ancienne fabrique. Les kanji (caractères sino-japonais) sont taillés dans du bois de cèdre, le même qu’on utilisait pour la fabrication des fûts de fermentation.

Une visite guidée en anglais pour tout savoir sur le saké

J’ai vraiment adoré la visite guidée gratuite proposée par la brasserie. Il y en a plusieurs par jour en japonais, plus une en anglais à quatorze heures. Le tour dure une trentaine de minutes et nous emmène vraiment sur les lieux de fabrication de saké, où l’on peut voir les employés à l’œuvre. De plus, ce bâtiment de plus de cent-vingt ans a un véritable charme. A l’intérieur, la lumière tamisée et les effluves de bois et de saké créent une atmosphère très agréable…

La brasserie Imayo Tsukasa permet vraiment aux visiteurs de pénétrer au cœur des lieux. C'est très excitant de se promener dans ce beau bâtiment qui respire la tradition et la bonne odeur fruitée du saké...
La visite de la brasserie Imayo Tsukasa permet vraiment aux visiteurs de pénétrer au cœur des lieux. C’est très excitant de se promener dans ce beau bâtiment qui respire la tradition et la bonne odeur fruitée du saké…

En plus de la beauté des lieux, j’ai énormément apprécié de pouvoir m’approcher des machines, tuyauteries et autres cuves. Notre guide, une jeune japonaise parlant très bien anglais, était tout simplement adorable. Elle a patiemment répondu à toutes mes questions de novice et m’a gentiment conseillée sur les types de saké qui pourraient me plaire (mais sans me pousser à l’achat !). Tout ça gratuitement…

D’habitude, la brasserie propose également une dégustation d’une dizaine de types de sakés pour 1000 yens (moins de dix euros !). Malheureusement, la dégustation n’était pas disponible à cause de l’épidémie de coronavirus :'( Dommage, j’aurais vraiment aimé pouvoir comparer les différentes sortes de saké ! Sec ou sucré, pasteurisé ou non, fermenté en fût de cèdre ou en cuve émaillée…

Une plongée au cœur de la production du saké de Niigata

Le processus de fabrication du saké passe d'abord par le polissage des grains de riz. Plus il s'agit d'un saké de prestige, plus on utilisera de riz blanc (par opposition au riz complet). Cela impacte toute la production, car il faut alors laver les fragiles grains blancs à la main, puis leur octroyer un temps de fermentation plus long.
Le processus de fabrication du saké passe d’abord par le polissage des grains de riz. Plus il s’agit d’un saké de prestige, plus on utilisera de riz blanc (par opposition au riz complet). Cela impacte toute la production, car il faut alors laver les fragiles grains blancs à la main, puis leur octroyer un temps de fermentation plus long.
L'étape suivante est la fermentation d'un mélange de riz, d'eau et de levures naturelles que l'on retrouve dans le riz "kôji". De nos jours, la fermentation du saké se fait généralement dans de grandes cuves émaillées. Cependant, la brasserie Imayo Tsukasa a réussi à commander de nouvelles cuves traditionnelles en bois de cèdre grâce à une campagne de financement participatif ! Ces cuves de plus de 4000 litres, coûtant environ le prix d'une maison, ne sont plus fabriquées que par un seul artisan près d'Ôsaka. Un savoir-faire qui risque bien de se perdre dans les années à venir...
L’étape suivante est la fermentation d’un mélange de riz, d’eau et de levures naturelles que l’on retrouve dans le riz « kôji ». De nos jours, la fermentation du saké se fait généralement dans de grandes cuves émaillées. Cependant, la brasserie Imayo Tsukasa a réussi à commander de nouvelles cuves traditionnelles en bois de cèdre grâce à une campagne de financement participatif ! Ces cuves de plus de 4000 litres, coûtant environ le prix d’une maison, ne sont plus fabriquées que par un seul artisan près d’Ôsaka. Un savoir-faire qui risque bien de se perdre dans les années à venir…
Après la première phase de fermentation, le saké est complètement opaque. Il est alors filtré à travers cette machine composée de dizaines de panneaux de tissu. On obtient, d’un côté, un saké clarifié et, de l’autre, de fines plaques de « sakekasu ». Une sorte de « moud de riz », si on veut… Cette pâte un peu sableuse, au goût légèrement sucré et fermenté, est vendue dans les magasins d’alimentation comme condiment. On s’en sert par exemple pour paner la viande ou pour remplacer le miso dans la soupe. J’ai déjà eu l’occasion de goûter et j’aime beaucoup ça !

Le saké, un produit de saison

Comme le vin, le saké n’est produit que pendant une saison donnée, avec le riz nouveau de l’année. Les récoltes se faisant en automne, la production du saké démarre en hiver et la dégustation commence avec le printemps. C’est-à-dire qu’on est en plein dedans ! J’ai ainsi eu la chance de goûter un saké de printemps impossible à commercialiser hors du Japon, le namazaké. Ce saké au goût exceptionnellement frais et fruité ne peut en effet être exporté car il se conserve très peu de temps et seulement au frigo. Pourquoi ? Parce qu’il n’est pas pasteurisé !

La dernière étape avant mise en bouteille consiste à pasteuriser le saké. Pour ce faire, la brasserie utilise une grande cuve remplie d'eau à 70°C, à travers laquelle s'enroule un fin tuyau de métal. Le saké circule dans le tuyau, ce qui permet de le chauffer et d'augmenter considérablement son temps de conservation.
La dernière étape avant mise en bouteille consiste à pasteuriser le saké. Pour ce faire, la brasserie utilise une grande cuve remplie d’eau à 70°C, dans laquelle s’enroule un fin tuyau de métal. Le saké circule dans ce tuyau, ce qui permet de le chauffer et d’augmenter ainsi considérablement son temps de conservation.

Comment déguster le saké japonais ?

En temps normal (comprenez : hors coronavirus), la brasserie propose des dégustations de saké dans la jolie maison ancienne attenante à la fabrique.

La palette des goûts du saké varie du sec au doux, voire très sucré, en passant par le fleuri, le fruité et le boisé (surtout s’il a été fermenté en fût de cèdre !). On le déguste souvent en accompagnement des repas japonais traditionnels et, fait qui étonne souvent les Occidentaux, il se consomme aussi chaud.

Une tasse en porcelaine spéciale

La dégustation du saké se fait généralement dans une de ces petites tasses spéciales.

Les cercles blancs et bleus de ces tasses permettent de faire ressortir la robe du saké, plus ou moins jaune. On peut également apprécier l’éventuelle opacité de certains crus grâces aux lignes plus foncées. Enfin, ces tasses en porcelaine permettent de déguster le saké aussi bien chaud que froid !

Êtes-vous team saké froid ou team saké chaud ?

Il s’agit souvent d’une préférence personnelle, même si de nombreux autres critères entrent en compte. On y retrouve notamment la saison, les mets consommés avec le saké, la qualité du saké et son caractère sec ou doux. En général, les grands crus sont plutôt dégustés froids. Enfin, on aura plutôt tendance à faire chauffer les sakés secs, car cela les adoucit.

Pour faire chauffer le saké, on utilise traditionnellement une petite carafe en porcelaine ou faïence, que l’on chauffe au bain-marie. Cependant, de plus en plus de Japonais chauffent tout simplement leur saké au micro-ondes… Moins glamour mais tout aussi efficace ! 😉

Pour ceux qui ne boivent pas d’alcool, il existe également l’amazaké, qui contient moins d’un pourcent d’alcool. Comme il est généralement consommé chaud, le fait de le faire chauffer permet en principe de faire disparaître le peu d’alcool contenu. C’est une boisson opaque, sorte de saké dont la fermentation aurait été interrompue avant que le sucre ne se transforme en alcool. Personnellement, je trouve que ça ressemble au kefir… Intéressant, mais un poil trop sucré à mon goût !

Chers Radis, c’est ainsi que se termine notre petite visite guidée de la belle brasserie Imayo Tsukasa 🙂 J’espère que ça vous a plu et intrigués ! Est-ce que le saké est un produit familier pour vous ? J’ai l’impression que c’est encore assez méconnu en France…

Cet article a 8 commentaires

  1. Chlo

    Article très intéressant, merci beaucoup ! Je crois avoir bu du saké une fois, il y a longtemps, et je n’en garde pas un bon souvenir… Mais je suis prête à réessayer pour ne pas rester sur une mauvaise expérience 😉 Hâte de pouvoir trinquer avec toi pour nos retrouvailles <3 <3

    1. Marion

      Oooh, défi relevé : j’essaierai de te faire aimer le saké 😉 Je pense que c’est comme le vin, c’est une saveur qui s’apprivoise. A la première dégustation, moi aussi ça m’a destabilisée…
      Et puis, il existe tellement de types de sakés différents que je suis sûre que chacun peut en trouver un à son goût 🙂

  2. Hildegard

    Merci pour la visite virtuelle,très tendance par ici ces temps ci 🙂
    Je me laisserais bien tenter par une dégustation de saké de printemps sous les arbres en fleurs🌸
    Kampaï !

    1. Marion

      C’est ce que je me suis dit : si tu ne vas aux sorties culturelles, les sorties culturelles viendront à toi ^^
      かんぱい!

  3. Crapulax

    Coucou, je suis un peu en retard, mais c’était très intéressant !
    Je fais partie de la team français moyen qui croyait que le saké c’est de la gnôle ! ^^
    Faut dire que dans les représentations de la culture japonaise, ils te déglutissent ça comme des pirates buvant du rhum des Caraïbes (Yarr!)
    j’ai été très surpris d’apprendre que c’est brassé ! est-ce donc pétillant ?? Curieux…

    1. Marion

      C’est vrai que quand ils s’y mettent, surtout entre mecs, ça peut prendre des tournures de corsaires…
      Du coup en principe non, ce n’est pas pétillant du tout, même si certaines brasseries se sont récemment amusées à faire des sakés pétillants pour imiter les vins pétillants comme le champagne. J’ai pas encore testé, ça m’inspire pas trop ^^’
      Pour résumer je dirais que c’est intéressant de goûter le saké au moins une fois parce que c’est une saveur très différente de tout ce qu’on connaît en Europe !

  4. Crapulax

    La question qu’on peut se poser en lisant cet article, c’est : Où acheter du bon saké en France ? Est-ce hors de prix ?
    Je serais curieux d’avoir une bonne adresse à Grenoble ^^
    Bisous

    1. Marion

      Eh bien figure-toi que je n’en sais rien, même si je pense que ça doit forcément être un peu cher pour ne pas boire de la piquette.
      A ta place j’irais faire un tour à mon adresse chérie que tu connais déjà bien, cet îlot de Japon en plein Grenoble… Je pense bien sûr à Ozenya ^^ Si elles n’en vendent pas, je suis sûre qu’elles sauront te conseiller ! Si ça se trouve, elles en ont même à la carte ?

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