Aujourd’hui, je voudrais partager avec vous ma dernière découverte culinaire au Japon : les sansai, ou plantes sauvages comestibles ! En effet, comme j’ai le bonheur de loger dans une ferme familiale, cela fait plusieurs fois que nous en cuisinons. Ces « légumes de montagne », comme on les appelle en japonais (山菜), sont un grand classique de la cuisine japonaise printanière. Herbes des talus, fleurs sauvages, jeunes pousses d’arbres…. On les utilise de nombreuses manières, y compris dans les desserts ! Je voulais absolument partager cette expérience avec vous. Je vous propose donc un petit tour dans la prairie derrière la ferme 😉

Armoise japonaise ou « yomogi » : la star des sansai
Une herbe aromatique qui donne la pêche !
Le yomogi est probablement la première plante qui vient à l’esprit des Japonais quand on évoque les sansai. En effet, on voit ces petites touffes de feuilles vert foncé pousser DE PARTOUT… Elle peuvent même être envahissantes avec leurs rhizomes ! Mais c’est loin d’être une mauvaise herbe 😉 L’armoise japonaise, comme on l’appelle en français, est une super-plante aromatique riche en vitamines A, B1, B2 et C, ainsi qu’en minéraux. D’après Kôshô, un autre volontaire de la ferme où je séjourne, on peut même en mettre dans l’eau bien chaude de son bain pour stimuler le corps.

Le yomogi, une saveur complétement inédite
Le yomogi possède un arôme résineux, presque camphré, qui passe ou qui casse… Les feuilles contiennent de l’huile essentielle d’eucalyptol, ce qui leur donne un goût rafraîchissant. Moi j’aime bien, mais à petite dose, comme une herbe aromatique. Ça me rappelle un peu le laurier… Mais ça reste différent ! Quand j’en mange, j’apprécie surtout de découvrir un goût complétement nouveau, absent de ma bibliothèque habituelle de saveurs 🙂

En version salée, le yomogi vient très avantageusement assaisonner soupes et ragoûts, en particulier le sukiyaki de bœuf. C’est aussi très bon en tempura, car la friture lui donne une texture bien croustillante, tandis que le goût herbacé du yomogi épice agréablement le beignet. On peut aussi manger les feuilles simplement blanchies ou mijotées, comme des épinards par exemple. Mais l’arôme devient alors un peu trop fort à mon goût… Presque « médicamenteux », même !
La poudre d’armoise, un incontournable des desserts japonais et coréens

Je n’avais jamais vu de plante de yomogi auparavant, et pourtant je connaissais le mot « armoise ». En effet, même en France on la retrouve dans les intitulés de desserts japonais et coréens ! C’est notamment le cas à la carte du Doshilack, mon resto coréen préféré à Lyon.

Pour être utilisée en dessert, l’armoise est généralement séchée et réduite en poudre. Elle apporte alors un goût plus doux que la version fraîche, mais toujours une intense couleur verte, grâce à sa concentration en chlorophylle. Même si ça peut nous paraître un peu incongru, le vert est très apprécié dans les desserts japonais, où l’on utilise aussi beaucoup le matcha (la poudre de thé vert).
Nanohana : quand la fleur de colza se fait légume
Ça fait des semaines que je me régale à manger des fleurs et des feuilles de nanohana, et je viens juste de comprendre qu’il s’agit de… colza ! Mais attention, pas un colza tout chétif comme on en voit dans les champs français. De belles tiges grasses et d’épaisses fleurs jaunes, qui se dégustent comme un légume !

Au Japon, la nanohana est une fleur typique du printemps, qu’on voit partout et qui pousse aussi bien au bord des chemins que dans les potagers. Comme le colza de chez nous, elle les illumine d’un beau jaune flashy. On la cueille jeune et on mange aussi bien les fleurs que la tige et les feuilles. Frite en tempura, sautée au wok ou tout simplement blanchie… En fait, la nanohana s’utilise un peu comme du brocolis ! Elle a un goût doux et une texture très tendre, pas du tout fibreuse. Ça résiste juste ce qu’il faut sous la dent… J’adore 🙂
Kanzô : la plus douce des plantes sauvages comestibles

Mon coup de cœur des sansai, c’est le kanzô ! En français, on lui donne les jolis noms de « lis d’un jour » ou « hémérocalle ». Dans quelques mois, ces parterres de feuilles qui squattent les talus et le bord des ruisseaux se couvriront de magnifiques fleurs orange. En attendant, chacun peut se régaler de la base tendre des tiges, réputée excellente pour le foie !

On ne mange que la base, à la texture fondante et croquante à la fois, pas fibreuse pour un sou. J’adore son goût légèrement sucré, qui rappelle les asperges vertes ultra-fines ou la partie la plus douce des oignons nouveaux… Je le trouve délicieux cru, au bord des chemins, mais on le mange plutôt blanchi ou en tempura. Moi qui adore les tempura, je considère cependant que la friture n’est pas le meilleur moyen de mettre en valeur le goût délicat du kanzô...
Taranome, l’arbre qu’on peut manger

Comme aux autres sous-espèces d’angélique, on attribue à l’angélique japonaise de nombreuses vertus médicinales. En effet, certaines formes d’angélique étaient utilisées en Europe pour combattre la peste… Mais au Japon, on déguste surtout ses jeunes pousses pour des raisons gustatives 😉 C’est également le cas pour de nombreux autres arbres, dont les Japonais n’hésitent pas à manger les jeunes feuilles au printemps. C’est intéressant de se dire qu’en France aussi il y a plein de jeunes pousses d’arbres comestibles, mais qu’on en mange rarement… Peut-être devrait-on s’inspirer des recettes japonaises pour les accommoder ?


Bambou nain ou « onizasa »

Je me suis déjà souvent régalée de pousses de bambou, mais je ne savais pas du tout que les feuilles étaient aussi utilisées en cuisine. À ma grande surprise, j’ai appris qu’on pouvait les consommer en infusion. J’ai aussi découvert que les feuilles des plus grandes variétés servent à envelopper les onigiri. On donne ainsi à ces boulettes de riz un léger goût herbacé, tout en les emballant pour le transport. Enfin, dans la préfecture de Niigata, où j’ai vécu cet hiver, on s’en sert pour envelopper les mochi avant de les faire cuire à la vapeur.

Et autres tampopo, nobiru, etc…
Avec ces quelques sansai croisés sur mon chemin, je ne vous donne qu’un aperçu de cette tranche fascinante de la gastronomie japonaise ! Il en existe bien sûr de nombreux autres… Dont certains que nous connaissons bien, comme le pissenlit, auquel les Japonais donnent le joli nom de tampopo. En France on le mange en salade, ici c’est plutôt en tempura, histoire de changer 😉
Pour la petite histoire, « Tampopo » (« pissenlit » en japonais) est le titre d’un de mes films japonais préférés ! Autre anecdote sur cette même fleur : en anglais, on l’appelle « dandelion ». Un mot qui vient bien entendu du français « dent de lion »… Or, savez-vous comment on l’appelle en allemand ? « Löwenzahn », qui signifie littéralement « dent de lion » !! Trop rigolo, non ? Bon, d’accord, je me calme et je remets ma casquette de linguiste au vestiaire… 😉

Chers Radis, j’espère que vous aurez apprécié cette balade printanière au milieu d’un pays magique où tout semble pouvoir se manger… 🙂 Moi, ça me donne envie de mieux connaître les plantes comestibles de ma région ! Et vous ? Est-ce que vous avez l’habitude de ramasser et de cuisiner des plantes sauvages ?
Aaaaah, ce petit article printanier fait vraiment du bien avec le temps morose et pluvieux qu’on a en ce moment (en tout cas en Alsace)…
Miam, le Doshilack, j’adore ! J’ai hâte de pouvoir y retourner 🙂
Et merci pour le clin d’œil de la linguiste 😉
Je t’avoue que je n’ai jamais mangé de plantes ou de fleurs comestibles type pissenlit ou autre, je n’y connais rien du tout !! Ça ne m’emballe pas trop en fait, j’aurai l’impression d’être un cheval xD Mais je serais ravie que tu me fasses découvrir ça un jour <3
Aaaah trop cool, encore un défi !!! J’adore :p C’est promis, au printemps prochain je te prépare une bonne salade de bébés pissenlits aux oeufs mollets comme fait ma Grand-Ma…
Je comprends le concept de cheval, mais on oublie souvent que les légumes qu’on achète aujourd’hui ne sont que des versions croisées et sélectionnées de ces mêmes plantes sauvages 😉
Je te convaincrai, hihihi
Ah ouiiii ça c’est trop bon !
Que de vert,de verdure, joli camaïeu. Appétissant et motivant pour aller faire nos propres recherches et cueillettes. Je goûterais bien les tempuras de bourgeons d’arbres et le gâteau à l’armoise. Miam
Le gâteau à l’armoise, je suis sûre que ça peut se refaire sans problème en France ! Il y a forcément du yomogi en poudre dans les épiceries japonaises et coréennes. On trouvera ça 😉
Quant au tempura de jeunes pousses, je suis sûre qu’on peut s’amuser avec les essences comestibles qu’on a en France… ^^
Hâte de faire des cueillettes et de la cuisine avec toi😘
Moi aussi aussi ! De toute manière quoi que ce soit en tempura, je suis partant 😀
Formidable cette nature qui se laisse manger
C’est beau et coloré et donne un sentiment d’abondance
Contents les végétariens
Gros bisous petite sensai
Oui, c’est un peu la maison de Hansel et Gretel, on a l’impression qu’on peut tout manger 😉